Des Suisses au service de la Grèce
La lutte des Grecs pour leur indépendance (1821-1829) a suscité une vague de sympathie en Europe, connue sous le nom de «philhellénisme».
Sur fond de romantisme, de libéralisme et de droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, la «cause grecque» enflamme une partie de l'opinion qui se sent investie d'un devoir fraternel envers une nation chrétienne luttant pour sa liberté. A cet égard, on connaît les épopées du poète anglais Byron, mort à Missolonghi pendant la guerre.
En Suisse aussi, on s'est enthousiasmé pour la Grèce. C'est justement l'objet d'une récente publication dirigée par Jean-Philippe Chenaux et parue ce printemps aux éditions Favre1. Des Suisses au service de la Grèce retrace le parcours de plusieurs de ces philhellènes dont certains ont consacré leur vie à la cause. Les contributions furent de natures diverses: l'aide logistique et financière du Genevois Jean Gabriel Eynard, l'appui rhétorique du Vaudois naturalisé français Benjamin Constant, la contribution poétique du Vaudois Juste Olivier, ou encore l'apport médical et journalistique du Zurichois Johann Jakob Meyer qui fonda, sur place et en pleine guerre, l'un des premiers journaux en langue grecque moderne, avant de tomber sous le feu ottoman. L'ouvrage a aussi le mérite de présenter des philhellènes moins connus, voire inconnus, comme le Vaudois Henri Fornèsy et le Bernois Emanuel Hahn, qui ont tous les deux combattu dans l'armée grecque.
Un chapitre est également consacré au traitement, par la presse genevoise et vaudoise, du quatrième siège de Missolonghi et des massacres qui s'ensuivirent. D'une manière générale, il est intéressant de relever que les médias jouèrent, déjà à cette époque, un rôle considérable dans la formation de l'opinion.
Des Suisses au service de la Grèce n'est pas qu'une compilation de récits connus. Il apporte aussi un éclairage nouveau sur des éléments ou des personnages oubliés. Il nous rappelle que «le rôle joué par la Suisse dans la naissance et l'activation du mouvement philhellène» n'est pas anecdotique, mais bel et bien «catalytique et déterminant» selon les termes utilisés par l'historienne grecque Anastasia Tsagkaraki2.
Notes:
1 Michelle Bouvier-Bron, Anastasia Tsagkaraki, Jean-Philippe Chenaux (dir.), Bernard Ducret, Alexis Krauss, Olivier Meuwly, Karl Reber, Des Suisses au service de la Grèce, Editions Favre SA, Lausanne, 2025, 296 p.
2 Ibid., p. 191.
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- Souveraineté numérique en acte – Editorial, Félicien Monnier
- Une guerre désastreuse – Alexandre Pahud
- Un conte militaire de Carl Spitteler – Lars Klawonn
- La colère et les algorithmes – Olivier Delacrétaz
- Quand la table enseigne à marcher dans le monde – Yannick Escher
- Vaud, champion trop discret de la prospérité suisse – Olivier Klunge
- Le F-35A ou rien – Edouard Hediger
- Pourquoi choisir? – Jean-François Cavin
- La monarchie reprend sa place – Le Coin du Ronchon
